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S'enraciner pour vivre la radicalité de l'Évangile

23 octobre 2020 Le mot du Padre

Dans ces temps où la question de la radicalité interpelle, l’objet de ces quelques lignes est d’essayer de comprendre, appuyé sur l’engagement guide ainée, ce que devrait signifier pour nous un authentique engagement religieux, pour autant que nous réalisons que, comme chrétiens, nous sommes appelés à vivre la radicalité de l’Évangile.

Lors du cérémonial d’engagement, la guide-aînée reçoit cette exhortation. « Que ta vie soit ainsi un chemin vers Dieu. »  À ceci, la guide-aînée répond un peu plus loin : « Faire toujours de mon mieux, être prête à donner le meilleur de moi-même au service de Dieu et des autres… chaque jour, tel est l'engagement que je vais prendre. » La guide-aînée doit donc faire qu’en sa vie se produise cet enracinement progressif, de plus en plus profond en Dieu. De cet enracinement découle un chemin ouvert pour le service et l’amour des autres.

Un radicalisme sans racine en Dieu mais qui puise son zèle et a ses racines dans le seul cœur de l’homme, dans des idées, des principes qu’il défend, qu’il sacralise conduit à la haine de l’homme. Celui qui ne s’enracine pas en Dieu, pense avoir Dieu pour lui, mais il n’a que des principes, et il a perdu Dieu en ne l’écoutant plus.

On ne peut pas prendre Dieu avec soi ; on ne peut pas avoir sa foi dans sa poche. Comme si notre foi pouvait être sans racine constante en Dieu ! Et cela peut pourtant nous arriver, lorsque notre piété se fait individualiste, lorsque nous pensons pouvoir recevoir Jésus pour nous, ou lorsque notre piété est remplacée par nos valeurs. Bons cathos nous le sommes, nous qui sommes pieux et tenons fièrement à nos valeurs !
Oh bien sûr, en plus nos valeurs nous viennent de l’Évangile, que nous avons écouté une fois (et encore pas sûr) pour ensuite ne plus avoir à l’écouter, emportant avec nous ce que nous jugions digne de garder, ayant ainsi coupé les racines qui nous plongent en Dieu.
Un jour, se moquant avec humour de certains intégristes, un prêtre me disait qu’ils sont de ceux qui veulent « faire la volonté de Dieu qu’Il le veuille ou non ». Ils ne suivent plus Dieu qui parle, et qui réclame notre écoute religieuse, mais seulement leurs idées, qui prennent l’apparence du sacré et de la religion. Ils sont égarés entre Dieu et les hommes. Ils ne marchent plus vers Dieu puisqu’ils ne l’écoutent plus. Et ils ne vont plus vers les hommes puisqu’ils sont enfermés dans leurs idées.

Nous sommes donc parfois nous-aussi ces êtres déracinés : nous conservons prioritairement de notre foi des valeurs et des principes auxquels nous nous attachons fortement et que nous défendons avec ferveur. Et ceci nous conduit soit à une mollesse religieuse : parce que finalement, « avoir des valeurs, c’est plutôt commode, plutôt que d’avoir un Dieu » ; les valeurs valent l’attachement que je leur porte, ce que j’y mets dedans ; je peux alors me contenter de faire de ma vie chrétienne l’invocation de grands principes qui sont là pour parer de vertu l’immobilisme pantouflard de ma charité évangélique. Soit au contraire, l’attachement affiché à ces valeurs et principes devient pour moi le lieu de tous les engagements militants pour les rendre vainqueurs, engagements qui finissent par se substituer au seul véritable engagement chrétien : me laisser vaincre par le Christ pour être tout à lui, être son disciple. Ne sont-ce pas d’ailleurs les dernières paroles du cérémonial d’engagement guide-ainée ?  « Que chacune d'entre nous, ayant renouvelé en son cœur avec toi son engagement, appartienne au Christ, s'en remette à Lui pour qu'Il soit, en nous et à travers nous, le Feu qui réchauffe, qui rassure et qui guide. » 

Celui qui est chrétien doit accepter d’être disciple, de devoir retourner à l’écoute de Dieu qui lui parle, pour être prêt à faire ce qu’il veut. Un chrétien est un être enraciné jusqu’à l’intime dans le Christ, qu’il écoute sans cesse. D’une vie qui rapproche de Dieu, du Christ, découle nécessairement un chemin qui rapproche des autres. La vie chrétienne authentique est un chemin qui de Dieu conduit vers les autres.  Celui-là seul qui a plongé les racines de sa vie, de son âme en Dieu est rendu capable d’accomplir comme le Christ le chemin qui conduit vraiment aux autres hommes. Lui qui « était auprès de Dieu » et qui s’est rendu proche au point de devenir l’un de nous. Aucune proximité réelle avec Dieu ne saurait exister sans produire en nous une profonde charité. Il est grand temps d’être nous-aussi des chrétiens enracinés.

Peut-être que prendre vraiment le temps de lire et écouter et prioritairement la Parole de Dieu pourrait être un bon remède, le lieu de croissance d’un christianisme véritable enraciné en Dieu.
 
Père Ambroise Riché
Vicaire à la paroisse d'Antony
Aumônier des groupes VIème, IIIème et Vème Antony




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